Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Objection Mon seigneur !

POINGS DE VUE : Acte 2 – publié sur Facebook en 2011

Tel sera l’objet de mon intervention Monseigneur: Objection !

Non inscrit sur vos listes de contributeurs, et non impliqué, pour venir répondre de quoi que ce soit, je m’octroie ici, le droit de délivrer mon message, à l’adresse de la Commission Vérité Justice et Réconciliation !

Je ne témoignerai d’aucune brimade ou violence subie, si vous ne considérez pas que la pire des violences que nous subissons au Togo, est l’accaparement des richesses nationales, et l’embrigadement de toute une population, depuis cinquante ans, dans un système féodal aux pratiques révolues, où les opportunités du pays , ne sont accessibles qu’aux seuls membres de la caste dirigeante et à leurs collaborateurs.

Le togolais ordinaire n’a pas le droit de réussir ; l’échelle sociale n’est accessible qu’à certains. La lutte pour l’indépendance du Togo, avait pour dessein l’idée d’un Togo pour les Togolais. Si les hommes ont décidé de fonder des sociétés Monseigneur, le besoin de vivre ensemble, tient dans la volonté de s’entraider et d’être plus forts. Mais alors, lorsque la force sert exclusivement ceux qui la détiennent, pour la mainmise sur les richesses collectives et le déni d’une justice sociale, par le détournement des ressources nationales vers des fins individuelles, Monseigneur sauf votre respect, je crois indéniablement que le verdict est simple : il y a violence ! Et c’est condamnable !

Mais passons !

La vérité est me semble-t-il chose ambigüe Monseigneur !  En dehors de preuves matérielles irréfutables, elle est sujette à fluctuations selon les versions qu’on en donne. C’est de plus en plus vrai dans vos audiences! Toutes ces versions différentes de la vérité de l’histoire de notre pays, risquent de vous faire douter de votre foi et je souhaite que Dieu vous en préserve ! Mais s’il est entendu que l’histoire des combats s’écrit surtout de la plume des vainqueurs, qui la travestissent à souhait pour servir leurs intérêts, comment avez-vous pu croire que votre  commission composée de certaines personnes dont la probité morale face aux deniers publics ne peut être prouvée, et au service d’un pouvoir qui règne depuis près de cinquante ans, permettrait de réconcilier les togolais victimes de ce pouvoir et établir une justice ne serait-ce que partielle ?

Vous êtes, Monseigneur, le grand metteur en scène de ce vaudeville, ce spectacle sordide que donne une nation qui a perdu ses repères, où chaque déclaration est balayée aussitôt par une autre, contradictoire, et personne ne distingue qui a tort, ni qui a raison ! Il ne peut y avoir de justice que lorsqu’un coupable est désigné et il n’y a pas de réconciliation si l’offenseur ne demande pas pardon à sa victime. Reprenez vos copies Monseigneur, tout votre devoir est à refaire. Et ce n’est même pas le moment d’occuper les responsables politiques et les populations par ces comédies publiques qui auraient meilleur succès à une foire du mensonge.

Mais voilà, si j’admets que les populations Kabyè ont été brimées dès les lendemains de l’indépendance par les élites d’Aného qui ont accédé au pouvoir, celles-ci ne sont plus là pour en être comptables et répondre de quoi que ce soit et leurs enfants auraient pu s’excuser des erreurs de leurs parents, si les populations Kabyè n’ont pas eu jusque là 50ans pour rendre coup pour coup. Alors Match nul !

Oui je le dis ! Et je l’assume ! Ces deux ethnies ont monopolisé la vie publique du Togo par leurs oppositions fantoches et leurs querelles avaient pour noms Sylvanus OLYMPIO et Eyadema GNASSINGBE. Les deux sont morts ! Le premier en 1963 et le second en 2005. Depuis le fils EYADEMA a hérité du pouvoir, puis il a fait alliance avec le fils OLYMPIO ! Que nous voulez-vous encore ? L’indépendance a créé une administration ‘guin’ avec Sylvanus OLYMPIO, ses parents et amis. Les coups d’ Etat successifs des années 60 ont favorisé l’avènement d’un Chef d’ Etat Kabyè, Eyadema GNASSINGBE qui a eu lui, la malice de mettre des Kabyè à des postes stratégiques de l’économie nationale et de constituer une armée Kabyè, solidement et entièrement acquise à sa cause, tout en n’oubliant pas de tenir les élites ‘guin’ tout près de lui en les gratifiant de postes ministériels qui contentaient leurs égos démesurés, traits de caractère communs de l’Ethnie. Devons-nous ad aeternam payer pour ces rivalités sordides en occultant les défis du présent auxquels nous sommes confrontés? Ce dont nous avons besoin, c’est de vivre décemment et de croire qu’un avenir est possible au sein de nos frontières ! Notre souhait est de voir les ressources de notre pays utilisées à bon escient et d’être convaincus que nos enfants peuvent croire encore que leur pays leur permettra de grandir et d’être formés à le servir !

Alors en quoi est-ce utile de raviver des plaies si ce n’est pas pour confronter les protagonistes et établir une vérité proche de la réalité ? Chaque jour, des individus défilent avec des versions différentes voire opposées,  des événements tragiques, qui jalonnent l’histoire du Togo! N’avez-vous pas compris que la CVJR, à l’instar d’autres institutions vaseuses du genre, ne servirait à rien ?

CVJR : Commission Vérité Justice et Réconciliation. Objection Monseigneur !

Il n’y a pas de Vérité qui risque d’être consignée à l’issue de vos audiences. Vous ne ferez pas la part des choses pour déterminer le vrai du faux, et sortir l’ivraie des bonnes herbes ! Vous n’en avez pas les moyens ! L’ État, qui vous a mandaté, est responsable en grande partie de ce qui s’est passé pour avoir occupé 50ans de la période de l’histoire du Togo que vous auscultez. Il ne reconnaîtra pas l’horreur de ses responsabilités, parce qu’il faudra ensuite admettre que son pouvoir n’est pas légitime ! Aucun pouvoir ne saurait être légitime s’il ne contribue pas à servir le peuple et à le protéger. Au sein de votre commission beaucoup sont impliqués, sûrement pas directement, mais parce que membres du RPT ils sont au courant des massacres qui ont été organisés, et leurs richesses tiennent tant de leur appartenance au RPT qui leur autorisait différentes malversations et détournements de fonds publics, qu’ils ne vous permettraient pas d’admettre les torts imputables à leur parti, au pouvoir encore à ce jour. Et s’il n’y a pas de Vérité, il n’y aura aucune Justice. Les dédommagements sommaires et ridicules qui interviendraient au sortir de vos travaux n’effaceront pas la peine causée aux victimes. Et s’il n’y a pas de Justice il n’y aura pas de Réconciliation. Tout devra être repris dans quelques années, quand effectivement un pouvoir neutre sera en place, et décidera de tirer la Nation vers le haut. Il choisira, s’il veut, de désigner un collège indépendant, pour établir l’histoire vraie de ces événements, et mettre face à face, victimes et bourreaux, afin qu’ils se pardonnent et se serrent la main pour construire ensemble le pays.

Que vous reste-t-il alors Monseigneur, si dans CVJR vous n’avez pas de V, pas de J et donc pas de ? Il vous reste vos Commissions ! Elles vous seront payées, vous qui participez à brader l’histoire du pays, la vie de toute une Nation, vous qui vendez nos âmes à chercher à construire une transcription bancale des événements tragiques de la Nation Togolaise, sous couvert de quête d’apaisement et de cohésion sociale.

Je suis convaincu que cette démarche n’est pas la meilleure. La cohésion sociale, se construira toute seule, si les togolais accèdent aux opportunités que le Togo leur doit, par un partage équitable des richesses et la mise en place de mesures efficaces à l’éradication de la misère sous toutes ses formes. Quand John Fitzgerald Kennedy disait : «  ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays », il ne pensait pas à un pays comme le Togo, sans démocratie, sans justice sociale et où les deniers publics sont l’argent de poche du Chef de l’ État et de ses collaborateurs. Il pensait à son pays à lui : les États Unis d’Amérique, exemple de démocratie où le bien-être du peuple, seul, est l’objet des efforts politiques. Voici d’ailleurs la citation complète : « Vous qui, comme moi, êtes Américains, ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays. Vous qui, comme moi, êtes citoyens du monde, ne vous demandez pas ce que les États-Unis peuvent faire pour le monde, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour le monde. ».

Alors lorsque le Togo, fournira à ses populations, santé, éducation, formation et emploi, il y aura une incontestable cohésion sociale, et chaque togolais pourra donc se demander ce qu’il est capable de faire en retour pour son pays. Le pouvoir et les richesses ne peuvent pas être confisqués et on espèrerait un apaisement possible de la part des populations. Nonsense !

Alors Objection Monseigneur !

Vous n’avez pas failli à votre mission de Président de la CVJR. Vous saviez dès le début, quelle mission délicate était la vôtre, et combien ce serait compliqué, d’établir la vraie vérité, avec une commission pareille, dans un pareil contexte. Si donc vous avez accepté cette mission, vous saviez qu’elle ne servira qu’à rendre un travail partiel, que vous consignerez pourtant, avec les institutions partenaires, comme entièrement accompli.  Et ce ne serait pas la première fois au Togo, que des problèmes essentiels seraient survolés et non résolus.

Mais alors vous avez failli à votre mission de prélat ! Garant de l’enseignement religieux, catholique, vous ne devriez pas être là à collaborer, à instruire une malversation organisée de l’histoire du peuple, pour rendre service au pouvoir. Vous devriez défendre les valeurs morales de notre République, et vous voilà responsable de cette mascarade. L’histoire retiendra votre nom comme tel. L’échec de la Conférence Nationale et de la transition a un nom : Joseph Kokou KOFFIGOH. Celui de la CVJR portera le vôtre Monseigneur. Vous auriez dû prendre position en vertu de votre foi et de vos engagements religieux, pour refuser ces mascarades et démissionner s’il le fallait. Mgr Desmond TUTU s’est opposé à nombre de politiques médiocres par la force de ses convictions. Cela lui a valu sa notoriété et le respect mondial qu’il inspire. Votre titre d’évêque, que vous avez obtenu après beaucoup d’efforts et de privations, je suppose, n’aura servi qu’à tenter de crédibiliser un processus paralytique de réconciliation chimérique. Ces délires, mis en scène devant vous, qui ont rouvert des plaies au lieu de les fermer, créeront une hémorragie dont seront seuls responsables, votre manque de charisme et de volonté, votre déni des principes fondamentaux de vérité et de droiture qui sous-tendent la foi chrétienne, et votre choix de braver le poids de l’histoire en pactisant avec le  pouvoir sans morale qui tient le peuple dans la misère.

Vous vous reposerez à la suite de vos travaux, vous profiterez de vos Commissions et de vos honoraires, vous serez gratifiés sûrement de quelques distinctions genre Commandeur de l’Ordre du Mono, si ce n’est déjà fait. Mais tandis que se poursuivent les violentes inactions du pouvoir, inamovible et immobile à créer un contexte favorable à l’épanouissement des populations, dans les mémoires de ces dernières, vous serez à jamais marqués du fer rouge des collabos. Vous avez eu l’occasion de faire l’histoire, vous l’avez compromise. Vous avez sûrement été manipulé. Malheureusement on plaint le mouton qui est tiré jusqu’à l’abattoir, mais nul ne plaint l’animal qui, convoitant l’appât, tombe dans le piège. Confessez-vous et que Dieu vous pardonne ! Vous n’êtes pas le premier prélat coupable de mauvais choix. Benoît XVI spécialiste de frasques en tous genres et d’autres légats pédophiles vous ravissent la vedette en ce moment. A croire que toute l’Église catholique mérite une analyse antivirus et une vraie mise à jour.

Pour finir Monseigneur, je voudrais dire à toute la commission que je suis convaincu que beaucoup d’efforts ont été fournis. Mais cela définitivement n’aura servi à rien. Les togolais n’ont pas vraiment à se réconcilier. Il n’y a  de problèmes entre les togolais que lorsqu’il est question de politique. Essentiellement.

Le jour où la politique servira tous les togolais et pas seulement quelques uns, le jour où les hommes politiques serviront leur pays en toute honnêteté en pensant à tous les togolais sans exception, le jour où les richesses seront réparties équitablement à toutes les composantes de la population en leur donnant la possibilité de se réaliser, ce jour-là, nous écarterons tout mauvais esprit qui gêne l’unité Nationale et nous bâtirons notre cité.

Pour l’heure, si le Président de la République et ses acolytes, veulent la réconciliation, qu’ils se mettent au travail pour de bon. La Santé, l’ Éducation, la Formation, l’Emploi, le Pouvoir d’achat, l’Autosuffisance alimentaire, le Développement, la Justice, la Paix, trop de chantiers non encore vraiment entamés les attendent et leur demandent de sortir de leurs salons et de leurs limousines.

Et si vous, Monseigneur, entouré de vos collègues de la commission, voudriez être utiles à quelque chose, consignez dans votre rapport, les disparités des versions reçues au cours de vos audiences, l’incomplétude du travail abattu, la nécessité de tout simplement dépasser les petites divergences entre ces deux seules ethnies sur la quarantaine que compte le Togo, et l’urgence de permettre aux populations que vous avez rencontrées lors de vos tournées dans tout le pays, de vivre décemment et d’aspirer au développement!

Voici mes Objections!

Monseigneur !

Lovejoyce Ayayi AMAVI

Consultant