C'est l'histoire de celle que l'on ne nomme que dans les murmures et les chuchotements d'une brise nocturne. Celle qui se veut discrète et ingénue mais qui couve en elle le feu sacré. Promethée du soir.
Son allure frêle et incertaine à laquelle il faut ajouter une grâce innée, lui donne une image de princesse perdue, dans les méandres d'une forêt sombre où pourtant elle semble ne rien craindre. La lueur d'une pleine lune permanente sans cris de loups la rassure. Le craquement de branches mortes sur son passage, le froufrou des bestiaux qui se cachent sous les feuillages est une musique qu'elle entend dans le secret de son esprit.
Elle a les yeux de l'innocente, le regard de la rigoureuse, le sourire d'une madonne, la bouche retroussée de la vestale orientale, et les doigts d'une cendrillon sans prince qui électrisent quand même au contact. Elle se fiche du reste.
De l'apparence composée qui fait de ces demoiselles des produits d'usine, elle n'en a cure. Elle les trouve toutes égales, jumelles sorties de laboratoires, clones comme on en voit dans les grandes cités, habillées pareilles, maquillées pour paraître et finir par ne pas exister. Elle, ne les envie pas. Elle, est simple, mais sa beauté transcende. Sa voix douce et reposée n'exclut pourtant pas la fermeté et la rigidité d'une volonté inébranlable.
C'est une sorcière.
Comme on en rencontre une fois dans sa vie. Elle, elle semble avoir plusieurs vies, passées comme futures. Elle surplombe le temps. On semble l'avoir déjà vue, connue et aimée dans une vie passée. On n'a que l'impression de devoir l'aimer dans de prochaines vies, sans jamais arriver à se défaire de son attraction.
C'est une sorcière.
Elle manipule à la baguette de son petit nez coquin, aux douces frictions de ses mains et lèvres qui font chaque fois jaillir un bonheur profondément ancré dans les antres thyroïdiens.
C'est une sorcière.
Elle fait croire le bonheur possible dans les tourments, dans un envoûtement si raisonnable que jamais nul ne veut être exorcisé. Languir de la revoir quand elle part chaque fois, devient une prière incessante qu'il faudrait louer des moines pour chanter éternellement. Son corps est si mou qu'on voudrait y dormir sans devoir se réveiller, espérant y mourir de plaisir.
C'est une sorcière.
Fabriquée par des anges. Elle n'a pas la méchanceté du démon mais elle est méchante d'enlever toute volonté de lui résister, sinon d'en être malade. Elle ne griffe ni ne mord qu'en criant elle même de plaisir. Son machiavélisme a l'approbation des papes et des évêques, puisqu'elle possède sans dominer, contrôle sans restreindre, et corrige sans punir.
C'est une sorcière.
Comme on en fait que pour des anges. Pour leur donner goût à la vie sur terre, eux qui sont venus du ciel pour remplir des missions importantes pour le divin. Pour qu'ils se réalisent et se régénèrent, qu'ils se nourrissent du feu sacré contenu dans le ventre de la sorcière, afin d'accomplir leurs bienheureux desseins et parvenir quand même au besoin, à déployer leurs ailes et à s'élever.
La terre est dure pour ceux qui viennent d'en haut. Aussi leur faut - il le concours de celles venues d'en haut également, mais dotées de pouvoirs impressionnants pour dominer et contrôler les passions d'ici bas, élaguer et trier l'ivraie de la bonne herbe, séparer les céréales et les charançons, et canaliser les bonnes énergies afin qu'elles soient renouvelables.
C'est une sorcière. Et moi je suis un ange. C'est une sorcière des anges.
Train Grenoble Paris. 11 Août 2016. #Lovejoyce 11h 35.
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